Publication de l’ordonnance SRP/encadrement des promotions

L’ordonnance très attendue relative au relèvement du seuil de revente à perte et à l’encadrement des promotions pour les denrées et certains produits alimentaires a été publiée au Journal Officiel le 13 décembre 2018 (ordonnance n° 2018-1128 du 12 décembre 2018). Cette ordonnance adoptée dans le cadre de la loi pour l’équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et alimentaire et une alimentation saine et durable (loi EGALIM) devrait modifier en profondeur les pratiques en matière de promotion des ventes des produits alimentaires.

En effet, outre le relèvement du seuil de revente à perte des denrées alimentaires et produits pet food au moyen de l’affectation d’un coefficient majorateur de 1,10 qui ne soulève pas de difficultés juridiques particulières (et qui doit entrer en vigueur à une date fixée par décret), cette ordonnance prévoit également un encadrement des opérations promotionnelles (i) en valeur et (ii) en volume.

  • En valeur tout d’abord.

L’ordonnance prévoit que « les avantages promotionnels, le cas échéant cumulés (—),  accordés au consommateur pour un produit déterminé ne sont pas supérieurs à 34% du prix de vente au consommateur ou à une augmentation de la quantité vendue équivalente ».

Le champ d’application d’un tel cantonnement suppose au préalable de définir ce qu’est un « avantage promotionnel ».

Selon l’ordonnance, il s’agit de tout avantage immédiat ou différé accordé au consommateur pour un produit déterminé ayant pour effet de réduire le prix de vente au consommateur. Une promotion annonçant une réduction de prix (accordée par le distributeur ou le fournisseur au moyen d’un NIP) du type X% de réduction ou X + X offerts entre incontestablement dans le champ de ces nouvelles dispositions.

En revanche, une remise promotionnelle sur facture accordée par un fournisseur à un distributeur qui ne serait pas répercutée au consommateur ne sera pas considérée comme un « avantage promotionnel ». Se poserait néanmoins dans ce cas la question de savoir si l’octroi d’une telle remise ne caractériserait pas un avantage sans contrepartie ou un déséquilibre significatif au sens de l’article L. 442-6 I du Code de commerce.

Enfin, les ventes avec primes (hors le cas des produits identiques offerts en primes qui doivent être considérés comme une réduction de prix par augmentation de la quantité vendue) et les loteries ne devraient pas être concernés par cette nouvelle limitation.

Outre la question de la définition des avantages promotionnels concernés, la mise en œuvre de cette ordonnance risque en pratique de soulever un certain nombre de difficultés. En premier lieu, la question de la valeur de l’avantage accordé va nécessairement impliquer de déterminer un prix de référence (appliqué pendant une période raisonnable avant la promotion) en comparaison duquel le plafonnement sera apprécié. Or, on sait que depuis l’abrogation de l’arrêté du 31 décembre 2008 relatif aux annonces de réduction de prix, et en l’absence de position claire de l’administration sur le sujet, il peut s’avérer délicat de définir un tel prix de référence et notamment ce qu’est un prix de référence « loyal » pour le consommateur au sens de l’article L 121-1 du Code de la consommation et de la Directive CE  2005/29 relative aux pratiques commerciales déloyales.

Enfin, on peut redouter que ce dispositif (et notamment la prise en compte des avantages accordés sous forme de NIP) entraîne des discussions entre les fournisseurs et les distributeurs sur leur politique promotionnelle afin de s’assurer du respect de la limitation prévue, ce qui présente un risque certain au regard du droit de la concurrence.

La limitation des promotions à 34 % du prix de vente consommateur entrera en vigueur le 1er janvier 2019.

  • En volume, en second lieu.

L’ordonnance prévoit que « Ces avantages promotionnels (—-) portent sur des produits ne représentant pas plus de 25 %  du chiffre d’affaires prévisionnel fixé par la convention prévue à l’article L. 441-7 du code de commerce » ou du volume prévisionnel pour les contrats de MDD.

Les avantages promotionnels visés par cette limitation en volume sont ceux précédemment évoqués mais dans la mesure où l’ordonnance vise expressément les avantages accordés aux consommateurs « pour un produit déterminé », se pose la question de savoir si la promotion peut être affectée à un produit donné afin d’être prise en compte dans les 25%.

Ainsi, les opérations de « cagnottage » ou l’octroi d’avantages non affectés à un produit déterminé  (ex : réduction sur une carte de fidélité pour un achat de plus de X euros en magasin) ne seront pas concernées par ce nouveau dispositif. En revanche, si un produit ou gamme de produits est à l’origine d’une opération de « cagnottage » au moyen de l’octroi d’un avantage sur une carte de fidélité (ex : 10 euros en bon d’achat pour 100 euros d’achat de produits de la gamme X), une telle opération devrait être concernée par le nouveau plafond de 25%.

La mise en œuvre du dispositif qui s’applique aux conventions 2019 suppose également pour les produits à marque nationale de prévoir un « chiffre d’affaires prévisionnel » dans la convention unique.

La seconde ordonnance qui doit modifier le titre IV du livre IV du Code de commerce, la loi EGALIM habilitant le gouvernement à « simplifier et préciser les dispositions relatives aux conventions mentionnées aux articles L. 441-7 et L441-7-1 » contiendra certainement des précisions sur la façon de déterminer ce « chiffre d’affaires prévisionnel » dans la convention unique. Il est toutefois très probable que cette seconde ordonnance intervienne après la signature des accords annuels.

 

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